La complémentarité de deux disciplines que sont l’ergonomie et de la toxicologie industrielle permet d’identifier et d’analyser les situations de travail exposant les travailleurs à des agents chimiques dangereux.
Quand l’ergonomie rencontre la toxicologie…
Démarche en ergotoxicologie : de quoi s’agit-il ?
La toxicologie industrielle est indispensable par l’apport de ses connaissances sur la toxicité induite par les agents chimiques rencontrés dans le milieu professionnel. L’ergonomie l’est tout autant pour appréhender le réel de l’activité et les variabilités qui la caractérisent pour replacer le risque chimique et sa prévention au cœur de l’activité de travail.
L’ergotoxicologie est une pratique particulière de l’ergonomie (B. Mohammed-Brahim & A. Garrigou, 2009 ; A. Garrigou, 2011) qui vise à développer une démarche opérationnelle, des outils et des moyens de prévention efficaces. Elle a pour objet de gérer et prévenir les risques pour la santé des travailleurs exposés à des produits chimiques.
L’ergotoxicologie mobilise des connaissances et des modèles issus de la toxicologie, de la médecine du travail et de l’ergonomie. Sa pratique nécessite donc un engagement multidisciplinaire, en ne perdant pas de vue que ses racines se nourrissent de l’analyse de l’activité de travail.
Ainsi que l’exprime le Dr B. Mohammed-Brahim dans l’ouvrage “Cancer et travail : comprendre et agir pour éliminer les cancers professionnels”, ETUI, 2018 : “L’ergotoxicologie propose [alors] un modèle de prévention qui conjugue des interventions techniques, organisationnelles et humaines capables d’agir sur les déterminants de la situation d’exposition révélés par l’analyse de l’activité de travail et les connaissances issues de la toxicologie” (cf. schéma ci-dessous).
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En quoi une démarche en ergotoxicologie peut-elle être utile et pertinente ?
L’approche ergotoxicologique permet d’intégrer les conditions réelles d’exposition prenant en compte les déterminants de la situation de travail. Elle apporte en conséquence des recommandations pour :
- le choix des équipements collectifs et individuels de protection,
- les modes d’organisation du travail,
- la configuration des espaces.
Au-delà de la dimension réglementaire, l’accompagnement va permettre d’apporter des connaissances opérationnelles et une démarche méthodologique pour mener à bien les différents projets en termes de prévention du risque chimique.
A quels types de demandes et besoins répond-elle ?
Situations rencontrées par le médecin du travail et l’équipe pluridisciplinaire en SPST :
- maladie professionnelle déclarée ou en passe de l’être ;
- gênes, plaintes, craintes remontées par des salariés (odeurs, maux de tête, etc.) ;
- symptômes cliniques constatés telles des irritations cutanées, gênes respiratoires, céphalées ou des résultats de biométrologie (sang, urine, radiologie…), etc. ;
- maintien en emploi d’un salarié présentant des restrictions liées à la manipulation, l’exposition à des produits ou des procédés chimiques, combinées à des sollicitations biomécaniques, dans un environnement sonore…
Situations rencontrées par l’entreprise (direction, IRP) :
- projet de conception, de transformation d’espaces de travail qui modifierait les situations d’exposition des salariés ;
- mise en place, évolution, changement d’un procédé de production avec des interrogations quant à l’impact sur les modes opératoires, le travail et la santé des salariés ;
- introduction d’un nouveau produit chimique ;
- suite à des métrologies conduites sur le plan réglementaire n’ayant pas apporté d’explication aux problématiques de santé remontées…
Un peu d’histoire…
- Approche initialement développée dans le cadre de l’anthropotechnologie (Wisner, 1997), combinée à une comparaison de l’usage des pesticides entre la France et le Brésil (Sznelwar,1992)
- Un développement conceptuel et méthodologique portant sur l’exposition des viticulteurs aux pesticides (B. Mohammed-Brahim et al., 1997) puis autour des activités de retrait de l’amiante (A. Garrigou, B. Mohammed-Brahim et F. Daniellou, 1998)
- Des approches actuelles étendues à différents activités industrielles : agriculture, BTP, chimie, agro-alimentaire…
L’ergotoxicologie et l’ASTI
Notre Association de Santé au Travail Interservices a été créée en 2004, à l’initiative du Dr B. Mohammed-Brahim et de R. Artigue.
B. Mohammed-Brahim prendra la direction de l’ASTI pendant une dizaine d’années tout en occupant des missions d’intervenant en toxicologie et en ergonomie.
L’approche inter et pluridisciplinaire de nos intervenants constitue l’ADN de l’ASTI.
Au fil des années et des interventions sur le terrain, nos ergonomes et toxicologues expérimentent et développent les démarches méthodologiques en ergotoxicologie.